Vers une contribution des collectivités à la réduction du déficit public

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Vers une contribution des collectivités à la réduction du déficit public

Mis à jour le

Pour sa première grand-messe annuelle, le Haut Conseil des Finances Publiques Locales frappe fort.
Passant au crible deux revues de dépenses afférentes aux collectivités, il pointe dans sa ligne de mire d’économies la masse salariale, les achats et les investissements.

Objectif : redresser coûte que coûte les comptes publics.

Réunis à Bercy le 9 avril dernier pour le Haut Conseil des Finances Publiques Locales (HCFPL), Gouvernement et associations d’élus ont débattu sur deux revues de dépenses des collectivités, réalisées par l’IGF (Inspection générale des finances).

L’occasion pour les pouvoirs publics de remettre sur la table un déficit public plus inquiétant qu’escompté. Et d’informer les territoires sur les efforts financiers qu’ils devront effectuer très prochainement.

Quid du déficit public en 2024

Depuis février, cela n’a pu échapper à personne dans l’Hexagone : les comptes publics voient rouge. Alors que l’estimation du déficit 2024 se portait en premier lieu sur 4,4 % du PIB (produit intérieur brut), elle a finalement été revue à la hausse à 5,1 % du PIB.

Pour mémoire, en raison de recettes insuffisantes (- 21 milliards d’euros), la dette publique française a culminé à 154 milliards d’euros en 2023, représentant 5,5 % du PIB. En 2022, elle s’établissait à 4,8 % contre 6,6 % en 2021 et 9 % en 2020 (effets Covid).

L'impact des collectivités locales sur le déficit public

Lorsque que l’on observe à la loupe la décomposition du déficit public, un enseignement notable se détache : les collectivités n’y participent que très faiblement.

Ainsi, au 4e trimestre 2023, voici comment se répartissait la dette entre les différentes administrations françaises selon l’Insee :

  • 81 % : l’État 
  • 8,5 % : les administrations de Sécurité sociale 
  • 8,1 % : les administrations publiques locales 
  • 2,1 % : les organismes divers d’administration centrale 

Les territoires n’ont donc pas nécessairement à pâlir d’une conséquente implication dans le déficit public. D’autant plus que, parallèlement, leur trésorerie nette et leur épargne brute (capacité d’auto-financement) affichent des valeurs très positives. La première a bondi de 26 % entre 2019 et 2023 pour se fixer à 50,8 milliards d’euros fin février 2024. Et la seconde a cru de 2,2 % sur la même période, s’élevant désormais à 35,3 milliards d’euros.

Réduction du déficit public : les collectivités grandement sollicitées

Il n’empêche que lorsque l’objectif suprême est de raboter pour tordre le cou à l’expansion de la dette, il convient de participer à l’effort de guerre. D’autant plus que dans son optimiste plan de stabilité budgétaire 2024-2027, le Gouvernement entend contracter le déficit à moins de 3 % du PIB d’ici à 2027.

Une ambition jugée « peu crédible » et « incohérente » par la Cour des comptes mais qu’importe, il faut bien commencer quelque part.
Et c’est à cet effet que les collectivités sont désormais grandement sollicitées pour mettre la main à la patte.

Quels leviers d'économies pour les collectivités ?

Pour honorer sa rigoureuse trajectoire budgétaire jusqu’en 2027, la France doit économiser 10 milliards d’euros en 2024, parmi lesquels 2,5 milliards d’euros pour les territoires.

Comment y parvenir ? Moult pistes sont actuellement envisagées : rogner sur les remboursements d’Assurance maladie et sur les allocations sociales parmi les principales, mais pas que. Les territoires sont sommés de diminuer de 0,5 % par an (sous l’inflation) l’augmentation de leurs dépenses de fonctionnement (+ 5,9 % en 2023). Une décision actée au sein de la loi n° 2023-1195 du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

Après avoir diligenté l’IGF pour dresser deux revues de dépenses des collectivités, des axes d’économies potentielles se dégagent pour atteindre ces fameux – 0,5 %. Elles ont été discutées le 9 avril dernier entre toutes les parties prenantes lors du Haut Conseil des Finances Publiques Locales.

Masse salariale : la stratégie des départs en retraite non remplacés

Analysant la masse salariale et les achats, la première revue de dépenses de l’IGF a dressé quelques constats.

Pesant 75 milliards d’euros en 2022, la masse salariale des collectivités françaises a connu une hausse de ses effectifs et de sa rémunération globale. Les causes ? Un réalignement favorable des rétributions, des mesures catégorielles, des doublons dans les communes et un vieillissement certain de la population d’agents.

Énumérant quelques préconisations vectrices d’économies, l’inspection générale des finances a directement écarté le volet rémunération. Selon elle, « les marges de manœuvre » y sont trop « limitées » au regard des « difficultés de recrutement croissantes ».

Par contre, elle a pointé du doigt un autre axe qui pourrait se révéler stratégique. « Les nombreux départs en retraite à venir offrent l’opportunité de repenser la structure d’emploi et l’organisation du travail ». En effet, à compter de 2035, les administrations publiques locales enregistreront 10 % de départs en retraite chaque année, soit une économie de 5 milliards d’euros par an.

En prenant en compte cet éloquent paramètre, en réagençant le temps de travail et en luttant plus farouchement contre l’absentéisme, les collectivités pourraient davantage rationaliser leurs dépenses de fonctionnement.

Des perspectives qui laissent les associations d’élus dubitatives et peu convaincues.

Achats des collectivités : professionnaliser et rechercher la performance

Sur le plan des achats publics et des charges, l’IGF établit le montant global à 51 milliards d’euros en 2022. Le bloc communal y participerait à 40 %. Un total en constante progression (+ 9 % par rapport à 2021, + 11 % par rapport à 2019) en raison de la reprise post-Covid et l’inflation sur les prix.

Pour l’inspection générale des finances, « en professionnalisant les achats et par la recherche de performance », tout en abandonnant « des objectifs politiques tels que l’achat local », plusieurs milliards d’euros pourraient être sauvegardés. L’IGF recommande de surcroit de simplifier « l’échange d’information sur les volumes et les prix de certains segments d’achat prioritaires » ainsi que de « faciliter et diffuser le recensement des pratiques de mutualisation et encourager leur évaluation en proposant un cadre méthodologique ».

Des suggestions auxquelles ne se sont pas opposées les associations d’élus.

Investissements : de nécessaires réorientations

Dans sa seconde revue de dépenses, l’inspection générale des finances s’est intéressée aux investissements. 58 % ont été effectués par les administrations locales en 2022 alors même que « le soutien de l’Etat croît plus vite que les investissements des collectivités dans les dépenses d’équipements ».  

Pour mener à bien les objectifs français de décarbonation, l’IGF évalue les investissements obligatoires pour la transition écologique à 21 milliards d’euros : 14,8 milliards d’euros pour l’atténuation, 4,6 milliards d’euros pour l’écosystème et 1,5 milliard d’euros pour l’adaptation.

Sur ce volet-là, l’inspection conseille davantage des « réorientations de dépenses » afin de générer des économies. Selon elle, 1 milliard d’euros par an pourrait être préservé grâce à la rénovation énergétique et à l’éclairage public. En outre, avec le développement exponentiel du télétravail, une réduction de « 10 % de la surface du bâti administratif pourrait se traduire par des réorientations d’investissement de 500 millions d’euros annuels ». Poussant l’analyse encore plus loin, l’IGF indique que la diminution du nombre d’élèves et la fermeture d’écoles offriraient l’opportunité de « redéployer 115 millions d’euros par an à horizon 2026 ».

Compter sur les dotations de l’État et la mutualisation

Soulignant « la prévisibilité et le ciblage des soutiens de l’État », l’inspection générale des finances recommanderait de structurer les dotations « autour de deux priorités : la transition écologique et la cohésion des territoires ». La péréquation dans la DGF (dotation globale de fonctionnement) et les projets labellisés « vert » bénéficiant de soutiens financiers s’en retrouveraient ainsi dynamisés.

Par ailleurs, l’IGF appelle les collectivités à « mutualiser les investissements structurants » puis à « harmoniser et étendre les règles d’amortissement », afin de « financer la transition via une contractualisation substantielle ». Pour l’inspection générale des finances, il faut « évaluer le FCTVA » (fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée), généraliser le CFU (compte financier unique), optimiser le suivi patrimonial des collectivités et appliquer une budgétisation verte.

Là aussi, les associations d’élus demeurent perplexes. Nul besoin, de toute façon, de prendre des directives strictes dès à présent. Un rapport de la Cour des comptes sur la participation des territoires au redressement des comptes publics est attendu pour juin. Ce n’est qu’à ce moment précis que les collectivités découvriront les efforts financiers qui leur seront véritablement exigés.

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